Adeline Leguy Selon l’activité et les compétences que l’enseignant décide de travailler avec ses élèves, la configuration de la classe devrait pouvoir changer. Mettre en permanence sa classe en îlots est un choix qui ne comporte pas que des avantages. En effet, les îlots sont pratiques pour la mise en activité, mais ils le sont moins dès qu’il s’agit de travailler individuellement ou d’évaluer les élèves par écrit. Ainsi, l’idéal serait de pousser les meubles et de changer la configuration de sa classe en fonction de l’activité prévue. Au quotidien, cela n’est pas si simple. Comment faire alors pour favoriser le travail de groupe dans une classe à configuration frontale ? Comment faire pour favoriser le travail individuel quand les élèves sont disposés en îlots ? Peut-on imaginer d’autres configurations en fonction des activités proposées ?
L’acquisition de compétences méthodologiques en îlots
Nous avons observé que, dans un collège où les classes sont disposées en îlots dans presque toutes les matières, la mise en activité et la gestion du groupe se trouvent facilitées. Les élèves ont acquis des habitudes de travail en groupe (organisation, gestion du bruit…) qu’ils n’ont pas lorsque le travail en îlots est ponctuel. Un enseignant qui travaille seul en îlots dans un collège où toutes les autres classes ont une configuration frontale peut se trouver confronté à des problèmes de gestion de classe : bavardages des élèves, évitement d’activités… Quand la mise en îlots permanente requiert une gestion de classe complexe, il est souhaitable de garder une configuration frontale et de fabriquer des îlots en déplaçant quelques tables lors des activités de groupe.
Schéma 1 : Configuration frontale (classe de 32 places + 1 table mobile)
Schéma 2 : Configuration lors de travaux de groupe : les élèves du 1er rang se retournent et travaillent avec ceux du 2e rang…
Il faut alors que la mise en îlots tienne un rôle pédagogique dont les élèves soient eux-mêmes conscients. L’objectif de l’acquisition des compétences est un atout pour stimuler le travail dans les îlots. Prenons le cas où les élèves doivent rédiger un bilan de la période d’enseignement écoulée. Avant la mise en activité, le professeur définit avec eux les compétences qu’il évalue et crée une échelle descriptive pour chacune d’elles. En sixième, une échelle descriptive mise en place par les élèves et leur professeur pour évaluer les compétences peut ressembler à cela :
| Très satisfaisant | Suffisant | Fragile | Insuffisant | |
| Domaine 1 :
Recourir à l’écriture pour réfléchir et pour apprendre : écrits de travail pour reformuler, produire des conclusions provisoires, des résumés |
Le texte est rédigé, complet et propre. | Le texte est rédigé et complet, mais n’est pas complètement mis au propre. | Le texte est incomplet (il manque des informations ou les informations essentielles ont été oubliées). | Le texte est très incomplet, il n’est pas rédigé ou/et pas recopié proprement. |
| Domaine 2 : Coopérer en développant le travail en groupe | Bonne entente dans le groupe, tous les élèves participent au travail dans le calme. Le travail est terminé dans le temps imparti. | Bonne entente dans le groupe, mais le groupe se disperse un peu. Le travail est terminé dans le temps imparti. | Des conflits ou agitations dans le groupe. Les élèves ne participent pas tous ou le travail n’est pas terminé dans le temps imparti. | Des élèves ne participent pas au travail du groupe (et le perturbent). Le travail n’est pas terminé dans le temps imparti. |
| Domaine 3 : Développer la confiance en soi et le respect des autres | Tous les élèves participent au travail en mutualisant les tâches et en s’entraidant. | Tous les élèves participent au travail pour un objectif commun. | Des élèves monopolisent le travail sans laisser la place de s’exprimer aux autres. | Des élèves perturbent le travail et empêchent le groupe de travailler efficacement. |
Des îlots mobiles pour les activités de lecture, d’écriture ou de langue
Pour un rendement optimal de l’activité en îlots, il est nécessaire de varier les temps d’activités : activités individuelles, en binômes, en îlots, collectives…
- Exemple n° 1 : Activité en îlots, suivie d’une mise en commun : synthèse collective
Chaque îlot travaille sur un sujet différent : les îlots ne communiquent pas entre eux, ce qui simplifie la gestion de classe et régule, en partie, le volume sonore de l’activité. Ainsi, les élèves étudient des textes différents d’un même corpus (poèmes, images, extraits d’une œuvre, textes documentaires…) et préparent la lecture et l’étude qu’ils présentent ensuite à la classe. Chaque îlot présentera son travail à l’oral, pendant que les autres prendront des notes. Quand tous les îlots auront présenté leur travail à l’oral, les élèves disposeront de l’étude détaillée d’un texte du corpus et d’une prise de notes sur les autres textes.
Les compétences du cycle 4 travaillées sont :
– Oral : Participer de façon constructive à des échanges oraux (parler, interagir, écouter)
– Écrire : Prise de notes, écrits préparatoires à l’oral
– Lire : Compétence liée à l’exercice précis qui était demandé
– Domaine 2 : Coopérer, organiser un travail de groupe
– Domaine 3 : S’engager dans sa formation, respecter les autres
- Exemple n° 2 : Activité individuelle, suivie d’un travail en îlots : compte rendu écrit de l’îlot
Chaque élève se voit attribuer une partie du travail pendant un temps limité. Chacun travaille individuellement. À l’issue du premier temps, les élèves de l’îlot mettent en commun leur travail pour rédiger un document écrit. Cette disposition est particulièrement pertinente si on veut travailler sur des notions de langue. Chaque élève observe un corpus concernant une partie d’une règle d’orthographe et doit en déduire la règle. Par îlot, les élèves se concertent et reconstruisent l’ensemble de la règle. Ils peuvent ensuite imaginer les exemples, les exercices…
Par exemple, la séance porte sur l’accord du participe passé : quatre corpus sont distribués : distinction –é/–er ; participe passé avec « être » ; participe passé avec « avoir » (cas général) ; participe passé avec « avoir » (COD placé avant).
Le professeur peut ainsi différencier les exercices demandés. Les élèves s’entraident après un temps de travail individuel et mettent en commun leurs recherches pour ne fournir qu’un seul document écrit qu’ils ont discuté et élaboré ensemble.
- Exemple n° 3 : Activité individuelle, suivie d’un travail en îlots : restitution orale
Une autre utilisation des îlots est intéressante pour mettre tous les élèves en activité. Il s’agit de donner un travail différent à chaque élève de l’îlot : chacun travaillera donc individuellement pendant un premier temps. Puis, les élèves de chaque îlot ayant travaillé sur le même sujet se regroupent, formant ainsi une nouvelle configuration de classe que l’on peut moduler en fonction des niveaux, des intérêts, des affinités ou de tout autre critère, selon l’exercice (voir schémas 3 et 4). Le professeur s’assure ainsi du travail individuel de chaque élève avant la phase de travail collectif. Cette mise en place est particulièrement efficace pour les travaux sollicitant une réflexion personnelle (formuler une opinion, s’engager en 3e) ou un apport créatif : les activités d’écriture, l’étude d’un personnage pour une mise en voix…
Schéma 3 Schéma 4
D’autres configurations pour travailler l’oral
L’enseignement de l’oral est aujourd’hui une priorité et ne peut être laissé à l’intuitif. L’espace de la classe n’est, cependant, pas toujours adapté aux activités orales et il n’est pas toujours aisé de trouver une autre salle (foyer, salle de réunion, gymnase, cour, CDI…) pour pratiquer l’oral de manière confortable. Changer les tables de place ouvre un espace propice à différents exercices oraux.
La configuration en U (schéma 5) est simple à mettre en place. Elle se prête particulièrement aux scènes théâtrales et mises en voix dans leur phase finale de présentation et aux jeux de rôle.
La configuration en cercle fermé (schéma 6) permet quant à elle d’assurer une meilleure gestion des débats ou des discussions de vie de classe. Incluant tous les élèves, elle facilite les échanges, les prises de parole et l’écoute.
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Les schémas sont réalisés avec 32 cubes individuels : chaque cube correspond à un élève.
Schéma 1 : Configuration frontale
Schéma 2 : Mise en îlots rapide
Schéma 3 : exemple 3.1
Schéma 4 : exemple 3.2
Schéma 5 : Configuration en U
Schéma 6 : Configuration en cercle