Le Douanier Rousseau au collège

Arts et Culture - 20 juin 2016 par Valérie Monfort

Visuel_Robert_6eme_webNous vous proposons de parcourir une exposition de peinture, le Douanier Rousseau au musée d’Orsay, en utilisant comme grille de lecture le nouveau programme du collège.

Par Valérie Monfort

« C’est bien simple, accrochez un Rousseau entre deux tableaux anciens et modernes, le Rousseau donnera toujours une impression plus forte » Derain
(cité par Maximilien Gauthier, Henri Rousseau, Les Gémeaux, 1949).

 

L’exposition qui se tient en ce moment du 22 mars au 17 juillet 2016 au musée d’Orsay rend hommage au Douanier Rousseau en cherchant à décentrer le regard que l’on a coutume de porter sur ce peintre. Le Douanier Rousseau est tenu pour un autodidacte dont on considère le plus souvent l’œuvre comme inclassable. Or, cette exposition fait dialoguer ses tableaux avec des œuvres qui permettent de l’inscrire dans une tradition, ainsi qu’avec d’autres qu’il a directement inspirées, faisant de lui un chantre de la modernité.

À cette occasion le musée met en ligne des ressources intéressantes pour procéder à une relecture de l’œuvre du Douanier Rousseau. Sur le site du musée, on pourra lire :

  • La présentation générale de l’exposition
  • La bande-annonce de l’exposition qui présente les tableaux mis en regard avec ceux du peintre : Le Douanier Rousseau, l’innocence archaïque.
  • La présentation détaillée qui reprend toutes les notices rédigées pour les visiteurs de l’exposition.

Plus largement, cette exposition est l’occasion de réfléchir à la façon dont les tableaux de ce peintre, qui ne laissent pas les élèves indifférents, peuvent être étudiés pour éclairer certains aspects du nouveau programme.

 

Un peintre qui renouvelle la représentation de soi à travers le concept du « portrait paysage » (programme de troisième) :

L’autoportrait intitulé « Moi-même, portrait-paysage » que Henri Rousseau réalise en 1890 permet de réfléchir à la façon dont la représentation de soi peut dialoguer avec un arrière-plan. Il permet aussi de compléter l’étude de l’histoire de l’autoportrait en peinture en posant un jalon supplémentaire dans la compréhension du statut social du peintre.

Qu’est-ce qu’un « portrait-paysage » ? Si l’autoportrait montre le peintre en pied dans d’imposantes dimensions, occupant le centre du tableau, le visage empreint d’un sérieux plein d’autorité, cet autoportrait est indissociable du paysage qui l’entoure. Ainsi, le chapeau du peintre est repris par la forme des nuages, le pinceau trouve un écho dans la proue du navire, et les couleurs de la palette semblent se répéter dans les pavois du bateau. Ce portrait constitue donc bien un ensemble cohérent avec le paysage qui l’entoure. Le corps en habit noir du peintre se dresse en parallèle de la tour Eiffel qui jaillit dans l’arrière-plan. En peignant ce monument si controversé lors de sa construction en 1889, le Douanier Rousseau revendique son appartenance à la modernité et aux audaces qu’elle doit permettre.

Quelle image du peintre apparaît dans ce « portrait-paysage » ? Même si la palette porte les indices d’un espace intime à travers les prénoms de ses deux épouses, le Douanier Rousseau cherche surtout à construire, à travers ce tableau, une image qui fasse de lui un peintre reconnu. L’artiste se représente dans l’exercice de son activité à travers la palette et le pinceau qu’il tient dans ses mains. Son costume sombre qui tranche avec le fond clair et les dimensions qu’il occupe lui confèrent une autorité qu’il affirme face aux badauds qu’il surplombe, semblant dire au spectateur qu’il ne faut pas le considérer comme un peintre du dimanche. On est également frappé par tous les signes d’une volonté d’élévation – la tour Eiffel, la montgolfière, les nuages – que peuvent-ils nous dire si ce n’est la volonté de l’artiste de faire partie des plus grands ?

 

Un peintre qui célèbre le monde et en présente les origines à travers ses œuvres mettant en scène le paradis perdu (programme de sixième) :

En 1910, le Douanier Rousseau peint le tableau Ève qui s’inscrit dans la série des « jungles » caractéristiques de l’œuvre du peintre. Ce tableau peut être étudié avec des élèves de sixième dans une séquence consacrée aux récits fondateurs. Par exemple, il peut accompagner l’étude de l’extrait de la Bible «  Adam et Eve chassés du paradis » à la page 143 de Passeurs de textes.

Deux propositions d’activités :

  • On pourra demander d’étudier ce tableau en le comparant à celui proposé dans le manuel, Le Jardin D’Éden ( 1536). On pourra guider les élèves à l’aide de ce questionnaire :
  1. À quel épisode du récit biblique s’est intéressé le peintre ?
  2. Étudiez le contraste des couleurs : quels éléments met-il en relation ?
  3. Pourquoi a-t-on l’impression que ce qui se passe entre le serpent et Ève brave un interdit ?
  • Un exercice d’écriture : écrivez la lettre que le Douanier Rousseau adresse à son ami le peintre Picasso pour lui expliquer son intention en peignant de cette façon cet épisode de la Bible.

 

Un peintre qui dénonce les comportements humains qui le révoltent dans un tableau saisissant (thème agir dans le monde, par exemple en troisième : individu et pouvoir) :

Le tableau « La Guerre » dit aussi « La Chevauchée de la discorde » que le Douanier Rousseau peint en 1894 ne manquera pas d’impressionner les élèves et de les inviter à réfléchir aux modes de représentation et de dénonciation de la guerre.

Deux propositions d’activités :

  • Ce tableau se prête à la confrontation avec des textes littéraires au cœur d’un corpus portant sur la représentation de la guerre. Il accompagnera par exemple un extrait du Colonel Chabert, et de Voyage au bout de la nuit. On demandera aux élèves de répondre à la question de corpus : quelles visions de la guerre proposent les textes et le tableau de ce corpus ?
  • Ce tableau permet de cerner le procédé de l’allégorie et d’inciter à la réflexion sur l’efficacité de recourir à cette figure. On peut ainsi proposer aux élèves de comparer une représentation réaliste de la guerre – un tableau de bataille, par exemple Napoléon visitant le champ de bataille au lendemain de la bataille d’Eylau le 9 février 1807 d’Antoine-Jean Gros – avec cette toile du Douanier Rousseau. On leur demandera de rédiger deux descriptions précises des tableaux, de noter les points communs entre les deux tableaux. On leur demandera ensuite de rédiger une réponse à la question suivante : d’après vous, quel peintre traduit le plus nettement les horreurs de la guerre ?

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